Toute ces supposées frustrations de Kylian Mbappé concernant la victoire du PSG me fatiguent. Je pense qu’il est simplement heureux pour ses potes. Evidemment il aurait préféré la gagner avec son nouveau club et ça arrivera probablement. Mais une fois le Real éliminé, si on lui avait posé la question de sa préférence pour un éventuel vainqueur… Il aurait souhaité naturellement la victoire du PSG bien qu’il soit en litige avec la direction. End of the story.
Son meilleur ami dans le foot est marocain, il se nomme Achraf Hakimi et tout pareil si le Maroc avait battu l’équipe de France en demi-finale de la dernière Coupe du monde, il aurait souhaité la victoire finale de son ami.

Friends de Charlotte Wilson sera donc notre photographie du jour.
C’est l’histoire du foot, c’est tout.
On se souvient que le PSG s’était séparé pour 0€ de Thiago Silva jugé bon pour la casse et que ce dernier avait gagné la Ligue des champions avec Chelsea l’année suivante. C’est comme ça.
Mbappé rêve depuis l’enfance de jouer au Real et il y est. C’est super pour lui.
Mais bref
Je vais vous raconter (version longue) d’une des plus grandes amitiés du sport que je connaisse.
Je vous encourage à regarder l’image par le lien du bas avant de vous lancer si vous trouvez le temps.
Cette photographie qui m’a au départ vraiment intrigué, parce que faite avant le match, alors qu’il n’y a rien à célébrer, m’a poussé à me documenter sur l’histoire. Elle est signée Michel Birot, une légende de la photographie de rugby et elle est en vitrine à la galerie en ce moment. Elle a été le point de départ d’un long papier que j’ai écrit pour Attitude à la demande de J, qui fut mon patron des années et pas qu’à L’Equipe et qui justement passe ce soir à la galerie.
Ce sera ma proposition du jour.
Comme hier, grosse remise, uniquement si vous venez la chercher pour que ma Kangoo reparte plus légère.
C’est une longue histoire, il vous faudra un peu de temps, mais elle va vous tirer une larme.
Quand j’avais interrogé Yannick Nyanga à gauche sur cette amitié qui le liait à Dimitri Szarzewski depuis toujours, il avait eu en substance une réponse à la Montaigne parlant de son amitié avec La Boétie :
» Parce que c’était lui parce que c’était moi ».
Pour ce papier j’ai parlé à tout le monde, à la famille, aux amis aux coaches et au bout du compte c’est une grande histoire d’amour qui m’a été contée par tous.
Nous sommes novembre 2005, au Stade de France, France vs Afrique du sud. Le match n’a pas commencé, les hymnes viennent de se terminer.
Et Michel Birot capte cette étreinte, à la fois douce et virile, intense, profonde.Tous deux fêtent leur première sélection en équipe de France. Yannick Nyanga, semble dit à son ami Dimitri Szarzewski : « On y est Dimi, on y est ». Ils sont là où ils ont rêvé d’être, quand enfants ils débutaient dans ce jeu. Comme tous les enfants le rêvent. Eux l’ont fait.
Alors repartons du début, du coeur de L’Hérault, où ils ont grandi tous deux.
Milieu des années 90, Dimitri défend, en benjamin puis minimes, les couleurs de Béziers et Yannick joue à Agde, distante de 25km par la D612. Ils s’affrontent régulièrement, plusieurs fois pas saison, et sans se connaitre, ils se sont déjà remarqués. Remarqués par qu’il sont remarquables. Yannick est le seul black de son équipe et Dimitri, les cheveux longs, d’un blond qui tire au blanc, les traits délicats, quasiment, féminins, fait tâche aussi. On ne voit que sa tignasse blonde aux quatre coins du terrain. Il est troisième ligne à l’époque et Yannick se souvient que quand il plaquait, ses victimes ne le confondaient plus avec une fille.
Ils se retrouvent ensemble pour la première fois dans la même équipe, en sélection départementale. Ils se sont reconnus et se parlent, mais rien n’a vraiment démarré encore.
Un peu plus tard le coach de cette sélection de l’Hérault, soucieux de voir le maximum de ses ouailles passer le cap et intégrer la sélection régionale (qui rassemblait Hérault et Aude) conseille à Dimitri de passer « dans la cage », au poste de talonneur. Sa souplesse et sa combativité y feront merveille, pense t’il.
Et au moins ils éviteront la concurrence directe, alors qu’il leur faudra affronter celle des écoles de rugby de Narbonne ou Carcassonne et de toute la rude jeunesse descendue des Corbières. C’est ainsi que Dimitri, devenu talonneur sans que ses performances faiblissent, passe le cap de la sélection régionale, avec Yannick.
Les liens se tissent, se renforcent encore quand ils intègrent le sport étude de Béziers. Dimitri résidant dans la ville ne peut y être interne, les places sont réservées à ceux qui viennent de plus loin, mais Yannick le devient. Il a aussi changé de club et intégré l’ASBH (AS Béziers Hérault), le club phare où Dimitri joue déjà.
Chaque fois qu’il sont sélectionnés en régionale et qu’ils doivent partir tôt le matin, Yannick quitte l’internat la veille et vient dîner et dormir dans la famille Szarzewski. Il y est accueilli avec chaleur et simplicité, « comme un enfant de plus » se souvient il. Véronique, la mère de Dimitri emploiera exactement les mêmes mots en se souvenant de cette époque. Encore aujourd’hui quand Yannick en parle, on sent que les liens tissés avec cette famille sont éternels.
Les choses s’enchainent ainsi et les rendent inséparables. Ils sont tous deux pris en sélection nationale des jeunes et disputent, en 2002, une finale de Coupe du monde U19 à Trévise contre les Baby Blacks. Ma gentillesse naturelle m’interdit de rappeler le score, mais cela reste un événement fondateur concernant leur histoire. Les parents font le déplacement vers l’Italie tous ensemble, Athanase, le père de Yanick, vite surnommé Athos et Véronique et David Szarzewski, les parents de Dimitri. Ils partent en voiture et ce trip soude les membres de ces deux familles aux origines éloignées. Entre la famille Szarzewski aux origines polonaises et la famille Nyanga venue de Kinshasa, le lien se fait, comme entre les enfants. Tout est fluide, naturel et se construit, par la successions d’aventures vécues ensemble. Véronique se souvient : « Lors de ce voyage, quelqu’un m’avait demandé si Yannick était mon fils… » Ce qui, même en prenant en compte d’une génétique capricieuse, semble assez peu probable. Elle est blonde aux yeux bleus et ce n’est pas, au premier coup d’oeil, ce qui caractérise Yannick. Cet anecdote les avait tous beaucoup fait rire.
Un peu plus tard, bac en poche, nos deux héros intègrent, toujours ensemble, le STAPS de Montpellier (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives) et prennent un appartement en colocation, évidemment. Ils sont alors totalement inséparables, dans les études, dans la vie quotidienne et dans le rugby et leur retour hebdomadaire pour les matches de l’ASBH, les voit résider alternativement dans leurs deux familles, ensemble, toujours.
A Montpellier, Dimitri, le tombeur, rencontre Florence dans une soirée étudiante. Le coup de foudre est immédiat et intense. L’affaire se passe en avril 2002, et dès la rentrée suivante de septembre, Dimitri demande à Yannick s’il est envisageable que Florence s’installe avec eux. Il s’en suit une colocation à trois où le couple d’amoureux s’épanouit et le tandem d’amis se renforce encore. Yannick, naturellement présent le soir de la rencontre laisse remonter ses souvenirs : « J’ai très vite senti que ce n’était pas juste pour rigoler eux deux. Que c’était parti et qu’ils allaient construire quelque chose ensemble ». Florence se souvient avec humour de cette année-là :
« C’est un peu comme si j’avais eu deux enfants, j’assumais tout. »
A propos du Dimitri séducteur, celui d’avant Florence, donc, Yannick laisse remonter un souvenir antérieur. Il se revoit au collège, il écoute deux filles qui discutent entre elles d’un certain Dimitri, beau comme un Dieu. Elles en parlaient comme si Apollon en comparaison était Quasimodo. « A l’époque, je ne le connaissais pas encore très bien et j’avais mis un moment à comprendre qu’elles parlaient de lui. »
Un peu après, vient le temps des sollicitation et du choix de carrière.Chacun doit faire sa route. Yannick part au Stade Toulousain et Dimitri qui a failli le faire aussi, opte finalement pour le Stade Français. Comme à chaque fois, ils en parlent et sans laisser leur lien gouverner, se conseillent mutuellement puis laissent l’autre décider seul.
Le contact reste permanent el les sélections en équipe de France, qui viennent très vite, les rassemble régulièrement. Après Sept ans de Stade Français, en 2012, Dimitri passe au Racing où il a été rejoint par Yannick un peu plus tard. (Ils sont aujourd’hui toujours au club dans l’encadrement).
Mais au-delà du temps et des souvenirs qui s’ajoutent les uns aux autres et transforment peu à peu des potes en amis, il n’est pas plus évident d’analyser une histoire d’amitié qu’une histoire d’amour. La même irrationalité gouverne les deux.
Quand ils en parlent tous les deux, ce qui s’exprime ressemble à ce que Montaigne disait de son amitié avec La Boétie : « Parce que c’était lui, parce que c’était moi ». Pourquoi cette fusion entre deux êtres si différents. Pourquoi Yannick, volubile et à l’aise en société à choisi Dimitri plutôt taiseux et réservé au départ et réciproquement… « Tout est si simple » annonce Dimitri , « c’est fusionnel, nous n’avons besoin de nous parler, je sais ce qu’il pense. Il n’y a jamais d’embrouilles, c’est clair et naturel. Je ne sais pas trop pourquoi, mais c’est comme ça. »
Yannick est plus précis : « C’est venu lentement, sans le vouloir, Dimitri est un gros chambreur quand il est à l’aise, mais c’est surtout quelqu’un qui te met à l’épreuve, qui ne donne pas son amitié comme ça. Il enchaine : « D’expérience, je peux dire que Dimitri réagit toujours comme j’attends et même comme je rêverais qu’il le fasse. C’est valable pour tous les types de situation, des plus simples au plus extrêmes et même les plus inattendues. Je ne suis jamais surpris, simplement renforcé ». Il ajoute : « je lui dois beaucoup, la notion de travail c’est lui que me l’a inculqué. Il m’a entrainé derrière lui , poussé, parfois simplement en se levant et en agissant. Pas sûr que sans lui j’aurais fait la même carrière ou en tous les cas si vite. Cela a été une force de l’avoir à mes côtés ».
Reste que pour que tout soit parfait, lil y a une vie au-delà du rugby, une vie a vivre en faisant en sorte que cette amitié s’y intègre et ne soit pas pesante pour les familles respectives. Pour Florence, l’épouse de Dimitri, c’est très simple, elle connu Yannick dès le premier jour et leur amitié s’est tissée en parallèle : « Je le connais depuis toujours, il était présent lors de mon premier accouchement et vivait les affres de cette paternité à venir avec quasiment autant d’intensité que Dimitri. Ce sont des frères de rugby mais aussi des frères de coeur. Le lien qui les unit est palpable. On en ressent l’intensité quand on les voit évoluer dans la même pièce. Ils se cherchent parfois même de manière inconsciente. »
Pour Laure, la fiancée de Yannick, ce fut plus délicat au début : « Quand notre histoire commencé, j’étais jeune fille au pair à Boston, Il était blessé longue durée à l’époque, et était venu me rejoindre. Il s’est donc passé un moment avant que je ne rencontre Dimitri. Je savais la place qu’il ’occupait dans la vie de Yannick et j’avais une petite appréhension avant de le rencontrer, comme si j’allais passer un test décisif ».
Tout s’est passé comme à l’habitude, le fluide généré par cette amitié contagieuse continue d’opérer et les deux familles n’en font qu’une. Aujourd’hui, Jade, la petite Nyanga, appelle Florence « Tati Flo » et réclame de voir ses « grands cousins » Hugo et Anna les enfants Szarzewski. Pas besoin de trois semaines pour organiser un diner, tout se fait comme ça et chacun se sent chez lui chez l’autre.
Mais revenons à l’image, celle qui nous a lancé sur cette histoire magnifique. Ceux qui connaissent un peu le rugby et le sport d’élite en général, savent qu’il est statistiquement fort peu probable que deux membres de la même équipe de jeunes fassent tous deux une carrière professionnelles et plus rare encore qu’ils accèdent tous deux au Graal, à l’équipe de France.
Tant d’impondérables sur leur progression mentale et physique, sur leur limites, sur la concurrence, sur les choix de carrière, les blessures. En un mot tant d’épreuves à passer.
C’est à peine croyable, une histoire digne du scénario d’un film américain, celui qui vous tire une larme discrète à la fin.
Et pourtant..
Yannick aura le mot de la fin en regardant l’image qui trône chez lui et que Dimitri, qui en a acheté deux, évidemment , lui a offerte : « C’est tellement beau de vivre ça avec son meilleur ami ».
(La règle à la galerie est que quand un sujet achète une photo de lui, il ne paye que 50% du prix. Il paye quand même, le vrai héros dans une galerie sera toujours l’auteur.)
Alors oui je crois en l’amitié sincère et je m’en réjouis. Sans jalousie ni amertume quel que soit le chemin que prennent les destins. J’en suis sûr, Achraf Hakimi et Ousmane Dembele se réjouiront tout autant d’une victoire de Kylian Mbappé en ligue des champions avec le Real s’ils en sont éliminés. Toute cette merde qui dégouline des réseaux pour faire des vues ou du clic me fait (presque) autant vomir que la Dengue que j’avais chopée à Bali, c’est vous dire. C’était mieux avant dirait Françis Cabrel. T’as raison Françis !
Alors vous l’imaginez, cette photographie a eu du succès. C’est quand même le bonheur d’avoir ça tous les jours sous les yeux. Tous les petits et moyens formats sont déjà partis. Ne restent que les deux grands tirages qui sont en 80X120. Le N°1/2 exposé actuellement et ensuite viendra le tour du dernier (N°2/2)
Elle est produite en diasec antireflet, un truc que l’atelier Authentic de Bruxelles (le top du Diasec) ne fait plus parce que la matière était tellement chère que le prix de l’encadrement le rendait impossible à vendre.
Dans ce format, ça m’a couté un œil, autant vous le dire. mais elle est là.
N°1/2 donc. Elle est à 7800€. je la laisserai partir à 6000€
Mais toujours à la condition que vous veniez la chercher ou que je la laisse sur place pour que vous lé récupériez.
J’ai tenté une photographie à travers la vitrine, ça vous donne une idée.
Si vous êtes encore là, c’est que cette photographie vous a happé comme elle continuera toujours de le faire pour moi.
Pour la voir comme elle est, c’est là-dessous que ça se passe.